Série – 15:30 de Isís Medeiros

*ce texte a été écrit pour l’open call Iandé/photodoc 2021

Isis Medeiros est une jeune photographe brésilienne originaire de l’état de Minas Gerais, au sud-est du pays. Elle se décrit comme photographe populaire et activiste. Pour ma part, j’ajouterais qu’elle est aussi une documentariste de l’écoute, qui crée des connexions avec les images, les gens, les situations.

L’état de Minas se distingue par ses villes coloniales, à l’instar de Mariana et de Ouro Preto, surgies au XVIIIe siècle sur la route de l’or. Et aujourd’hui encore, la région, qui compte quelques uns des plus beaux parcs du pays, est au cœur des intérêts économiques et politiques en raison de son sol, propice à l’extraction du fer et d’autres ressources minières : manganèse, or, nickel, niobium, zinc, quartz, soufre, phosphate, bauxite, pierres semi-précieuses.

C’est en 2015, qu’Isis décide de partir pour Mariana afin de documenter ce qui serait le plus grand crime socio-environnemental brésilien causé par la société Samarco/ Vale. A l’époque, la rupture du barrage Fundão, en déversant plus de 62 millions de mètres cubes de résidus de minéraux, avait anéanti l’ensemble des villages et espaces verts autour du bassin du Rio Doce. 5 ans après, de nouveaux barrages ont cédés, avec les mêmes conséquences. Les populations locales, elles, n’ont jamais eu leur mot à dire quant aux dédommagements prévus. Une partie de l’argent s’est même « envolé », sous l’impulsion de politiques peu scrupuleux, pour payer certains projets immobiliers et d’infrastructures de l’Etat.

Isis continue, encore à ce jour, son dialogue, photographique et humain, avec les populations locales. Ce qui ne devait être qu’un projet ponctuel, lié à l’actualité, est devenu, une quête, personnelle, autour de sa propre identité. L’exploitation de la région et de ses habitants, depuis des siècles, fait partie intégrante de son histoire. L’histoire de ceux qui ont tout perdu – maison, famille, amis, c’est, aussi, notre histoire, à nous tous, Brésiliens.

A travers son travail, Isis explore l’ensemble des enjeux sur cette question, au-delà des discours officiels et médiatiques. Elle va à la rencontre des familles sans-abris, des commerçants, des mineurs. Elle enquête sur les répercussions écologiques et sociales pour les villages situés au bord de la rivière. Elle interroge les indigènes, les enfants, les scientifiques… Le résultat photographique, pour cette artiste personnellement impliquée dans cette catastrophe, est souvent marqué par la frustration, l’indignation et la tristesse. Mais, en racontant cette histoire, collectivement, l’artiste arrive ainsi à rendre compte des altérités sociales et du poids particulièrement pesant du deuil dans cette tragédie.

Aujourd’hui, l’objectif d’Isis Medeiros est de continuer à porter le regard des peuples exploités de Minas, d’en être la mémoire, pour eux, pour elle-même, et pour le Brésil, mais aussi, peut-être, pour permettre une prise de conscience sur les changements à mener.

©Isis Medeiros
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GH, Gal et Hiroshima

Je me réjouis de faire partie du projet “GH, Gal et Hiroshima” qui se trouve entre les 10 finalistes du prix Louis Roederer 2022, avec le soutien de la Fondation Roederer et de Polka. La série sera exposé pendant les Rencontres d’Arles 2022. Avec moi dans ce projet, les deux artistes extraordinaires et la galerie Ateliê Oriente, à Rio de Janeiro, et aussi l’équipe de scénographie des Rencontres d’Arles et la commissaire Taous Dahmani.

La série “GH, Gal et Hiroshima” est un travail collaboratif entre les photographes Rodrigo Masina Pinheiro et Gal Cipreste Marinelli. A partir de leurs expériences personnelles, elles réfléchissent sur l’existence des personnes LGBTQIA+ qui naviguent entre les genres.

Autour de ses 10 ans, de retour de l’école, la photographe Rodrigo Pinheiro, surnommé Hiroshima (parce qu’elle est née le même jour que la bombe) a été lapidée dans la rue où elle habitait. Son apparence était trop ambiguë. En parallèle, Gal commence à porter des shorts courts, des sacs, des boucles d’oreilles. Aujourd’hui, ses talons hauts et l’identité non binaire sont souvent des raisons de déséquilibre dans sa famille. Gal est née le même jour que Harry S. Truman, le président américain qui a largué la bombe. « J’ai grandi en étant « Hiroshima » et je découvre que mon partenaire m’a lancé », relate Rodrigo.

 

La série est composée par différentes images : photos et objets d’archives, autoportraits, performance, photo documentaires de leurs lieux d’enfance, mémoires subjectives, objets du quotidien, entre autres. Ces images sont conçues dans un contexte de violence sexiste et de liens historiques et familiaux inquiétants. Elles dégagent un impact visuel intense car elles sont toutes transformées en métaphores de défense et d’autonomie. Comme les pierres sur les photos, qui ont été ramassées à Vila da Penha, périphérie de Rio de Janeiro, où vivait Hiroshima, et entourées de mousse. Une manière ludique de protéger l’enfance lapidé.

 

La beauté douloureuse de ce travail nous rappelle que la violence n’est possible que si elle s’inscrit dans des contextes culturels et politiques propices. Avec un président qui se déclare homophobe, le Brésil est un des pays où les taux de violence contre les LGBTQI + sont les plus élevés. De plus, une étude menée par 18 ONG internationales montre que la violence, les violations et les inégalités se sont accrues pendant les deux premières années du gouvernement Bolsonaro.

« GH, ces deux lettres qui représentent nos initiales, sont aussi le titre de l’un des livres brésiliens le plus connu de tous les temps, écrit par l’étonnante écrivaine Clarice Lispector : « La passion selon G.H. ». Par conséquent, ces deux lettres sont ancrées dans l’imaginaire collectif brésilien. Le livre nous inspire : un événement si horrible et inexplicable que pour le partager, il faut le perdre. Et nous citons le début du livre « J’essaie de comprendre, j’essaie de donner ce que j’ai vécu à quelqu’un d’autre et je ne sais pas à qui, mais je ne veux pas garder ce que j’ai vécu. Je ne sais pas quoi faire de ce que j’ai vécu. J’ai peur de ce trouble profond. Je ne fais pas confiance à ce qui m’est arrivée. » » – Rodrigo Pinheiro and Gal Cipreste Marinelli

 

D’une expérience personnelle, la série dialogue avec un thème social important et s’inscrit dans une histoire plus large, qui réfléchi sur la représentation du genre et de son corps. C’est une oeuvre de dénonciation, un cri d’indignation contre les structures sociétales qui engendrent des violences physiques et émotionnelles touchant tant de personnes. Comme une bombe, les deux photographes bouleversent au plus profond. “Gal, avec son impétuosité, était la bombe: celle qui se lance. Et moi, j’étais Hiroshima, les restes d’un territoire qui n’est plus aussi vulnérable qu’avant », nous raconte Rodrigo.

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What’s going on in Brazil?

Commissaire de l’exposition collective What’s going on in Brazil? avec le collectif Iandé. Participation de 12 photographes brésiliens – Ana Carolina Fernandes, Elsa Leydier, Simone Rodrigues, Karime Xavier, Fran Favero, Janine Moraes, Felipe Fittipaldi, Luis Baltar, Pedro Kuperman, Daniel Marenco, Shinji Nagabe et Dayan de Castro – à la Fondation Manuel Rivera Ortiz pendant le festival “Rencontres d’Arles”, 2019

Curator of the group exhibition What’s going on in Brazil? with collectif Iandé. We had the participation of 12 Brazilian photographers – Ana Carolina Fernandes, Elsa Leydier, Simone Rodrigues, Karime Xavier, Fran Favero, Janine Moraes, Felipe Fittipaldi, Luis Baltar, Pedro Kuperman, Daniel Marenco, Shinji Nagabe et Dayan de Castro – at the Fondation Manuel Rivera Ortiz during the “Rencontres d’Arles” festival, 2019

Communiqué presse
Visuelle de l’entrée de l’exposition collective  What’s going on in Brazil?
Invitation

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Article de la chercheuse Anysia Troinguis sur l’exposition “What’s going on in Brazil?” sur “Switch on paper” (2019) – pour l’intégralité de l’article cliquez ici.

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Wedemain

Article about the in game photography in “Wedemain” magazine (2019)

Article sur le in game photography  pour le magazine « Wedemain » (2019)

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Interview with Brazilian activist Sydney Possuelo for “Wedemain” magazine (2020)

Interview avec l’activiste brésilien Sydney Possuelo pour le magazine “Wedemain” (2020)

In partnership with Charles Carrasco and pictures by Scott Wallace

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