C’est la rentrée! Depuis un moment déjà, comme vous pouvez le constater, j’ai décidé de saisir ma chance dans ce vaste monde qu’est l’Internet. Un peu de vanité! J’avais déjà tenté auparavant, très brièvement, de petites invasions timides sur le web. Elles avaient toutes en commun un manque flagrant d’expérience et de temps. Résultat : mes quelques sites ouverts sont oubliés et perdus quelque part dans ce grand réseau. Mais cette fois-ci, je crois vraiment que ça va être différent, parce que je suis plus narcissique.
Que vous ayez un blog, une page facebook, un compte instagram ou youtube, tout contenu – vidéo, image ou texte – est personnel, et demande une certaine vanité pour être présenté aux yeux des autres. Comme dans le mythe de Narcisse, nous sommes attirés par le reflet de notre propre image et nous tombons amoureux de nous-mêmes. En cette ère technologique et instantanée, le mécanisme même du téléphone mobile et des réseaux sociaux conduit à un véritable exhibitionnisme. C’est comme si la société technologique nous encourageait à être plus vaniteux. Et un arrangement exact se forme, comme dans le mythe de Narcisse.
Mais il y a tout de même des limites !
Avoir de la vanité et de l’estime de soi, vouloir passer un message, partager quelque chose que nous trouvons fascinant avec le reste monde, c’est génial ! Et tout le monde suit des sites intéressants, voire même de véritables pépites. C’est grâce à ce genre d’exhibitionnisme que l’on trouve sur internet de nouveaux paramètres (des photos différentes, des idées surprenantes). Il y a dans les partages sur internet une prédisposition des individus à dialoguer entre eux. Un autre exemple sont les autoportraits, dits « selfies » : ils ont leur côté positif si on accepte de les voir comme des déconstructions du soi et comme une façon de nous (re)connaître au milieu de la masse cybernétique.
Mais que faire de la démesure ?
Narcisse n’était pas intéressé par le fait de divulguer son image, il est simplement tombé amoureux de lui-même et il s’auto-suffisait. Il ne cherchait ni à dialoguer, ni à délivrer un message. Alors que, dans le monde de l’image virtuelle, nous ne nous suffisons pas à nous-même. Au contraire, nous avons toujours besoin de l’approbation des autres. Nous voulons toujours plus de « likes », plus de commentaires et une circulation massive de notre message. L’originalité de l’image qu’on diffuse est moins importante que ses caractéristiques inhérentes à la mode du moment. C’est ce dernier critère qui donnera du crédit au contenu et favorisera un plus grand nombre de partages. La professeure américaine Jodi Dean parle, pour décrire ce phénomène, de la « valeur de circulation » d’une image, où la répétition et l’imitation sont des valeurs plus importantes que l’expression et l’analyse.
L’image perd sa valeur et s’épuise en elle même.
Le sociologue polonais Zigmunt Bauman estime que le présent est ce qui séduit, ce qui est accessible à notre société avide de consommation, d’information et de nouveautés. Nous vivons en fonction des stimuli externes, toujours attentifs à combler notre cerveau d’images, de sons, d’opinions et de sensations en permanence. Il y a une perte de signification de l’image parce que le processus de la photographie commence et se termine par une imitation rapide et désintéressée. Notre époque à tendance à détruire tout vestige des temps antérieurs, nous perdons notre capacité à nous lancer des défis et les relever, et à atteindre une liberté créative absolue.
L’internet fait partie de notre monde actuel. C’est une opportunité énorme de faire circuler de nouvelles idées et images à l’échelle mondiale. Nous devons croire en nous-mêmes au point de penser, et d’espérer, que ce que nous allons partager fera la différence. Mais il ne faut pas s’en tenir au nombre de « likes » et de commentaires : ce n’est pas en cela que réside le succès ou l’échec. J’ai déjà avoué mon exhibitionnisme, mais je ne veux rien prouver à personne, juste diminuer le confinement et enrichir le dialogue sur l’image et ses différents enjeux.