GH, Gal et Hiroshima

Je me réjouis de faire partie du projet “GH, Gal et Hiroshima” qui se trouve entre les 10 finalistes du prix Louis Roederer 2022, avec le soutien de la Fondation Roederer et de Polka. La série sera exposé pendant les Rencontres d’Arles 2022. Avec moi dans ce projet, les deux artistes extraordinaires et la galerie Ateliê Oriente, à Rio de Janeiro, et aussi l’équipe de scénographie des Rencontres d’Arles et la commissaire Taous Dahmani.

La série “GH, Gal et Hiroshima” est un travail collaboratif entre les photographes Rodrigo Masina Pinheiro et Gal Cipreste Marinelli. A partir de leurs expériences personnelles, elles réfléchissent sur l’existence des personnes LGBTQIA+ qui naviguent entre les genres.

Autour de ses 10 ans, de retour de l’école, la photographe Rodrigo Pinheiro, surnommé Hiroshima (parce qu’elle est née le même jour que la bombe) a été lapidée dans la rue où elle habitait. Son apparence était trop ambiguë. En parallèle, Gal commence à porter des shorts courts, des sacs, des boucles d’oreilles. Aujourd’hui, ses talons hauts et l’identité non binaire sont souvent des raisons de déséquilibre dans sa famille. Gal est née le même jour que Harry S. Truman, le président américain qui a largué la bombe. « J’ai grandi en étant « Hiroshima » et je découvre que mon partenaire m’a lancé », relate Rodrigo.

 

La série est composée par différentes images : photos et objets d’archives, autoportraits, performance, photo documentaires de leurs lieux d’enfance, mémoires subjectives, objets du quotidien, entre autres. Ces images sont conçues dans un contexte de violence sexiste et de liens historiques et familiaux inquiétants. Elles dégagent un impact visuel intense car elles sont toutes transformées en métaphores de défense et d’autonomie. Comme les pierres sur les photos, qui ont été ramassées à Vila da Penha, périphérie de Rio de Janeiro, où vivait Hiroshima, et entourées de mousse. Une manière ludique de protéger l’enfance lapidé.

 

La beauté douloureuse de ce travail nous rappelle que la violence n’est possible que si elle s’inscrit dans des contextes culturels et politiques propices. Avec un président qui se déclare homophobe, le Brésil est un des pays où les taux de violence contre les LGBTQI + sont les plus élevés. De plus, une étude menée par 18 ONG internationales montre que la violence, les violations et les inégalités se sont accrues pendant les deux premières années du gouvernement Bolsonaro.

« GH, ces deux lettres qui représentent nos initiales, sont aussi le titre de l’un des livres brésiliens le plus connu de tous les temps, écrit par l’étonnante écrivaine Clarice Lispector : « La passion selon G.H. ». Par conséquent, ces deux lettres sont ancrées dans l’imaginaire collectif brésilien. Le livre nous inspire : un événement si horrible et inexplicable que pour le partager, il faut le perdre. Et nous citons le début du livre « J’essaie de comprendre, j’essaie de donner ce que j’ai vécu à quelqu’un d’autre et je ne sais pas à qui, mais je ne veux pas garder ce que j’ai vécu. Je ne sais pas quoi faire de ce que j’ai vécu. J’ai peur de ce trouble profond. Je ne fais pas confiance à ce qui m’est arrivée. » » – Rodrigo Pinheiro and Gal Cipreste Marinelli

 

D’une expérience personnelle, la série dialogue avec un thème social important et s’inscrit dans une histoire plus large, qui réfléchi sur la représentation du genre et de son corps. C’est une oeuvre de dénonciation, un cri d’indignation contre les structures sociétales qui engendrent des violences physiques et émotionnelles touchant tant de personnes. Comme une bombe, les deux photographes bouleversent au plus profond. “Gal, avec son impétuosité, était la bombe: celle qui se lance. Et moi, j’étais Hiroshima, les restes d’un territoire qui n’est plus aussi vulnérable qu’avant », nous raconte Rodrigo.

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Des portraits de la photographie brésilienne

©Ale Ruaro, Mônica Maia

Article original paru sur Iandé.

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En 2017, le photographe Ale Ruaro a lancé sa série «Portraits de la photographie brésilienne». Depuis, il a photographié plus de 300 personnes, dont des photographes, des conservateurs, des éditeurs et des collectionneurs de photos. L’ensemble de ces images constitue une ode très importante à la mémoire et c’est un bel hommage à l’histoire de la photographie brésilienne et à ceux qui se consacrent à cet art. Même s’il manque un peu de diversité, avec plus de photographes indigènes et des régions plus lointaines et périphériques du territoire brésilien. Mais Ruaro est toujours en cours avec cette série, et nous montre de plus en plus une variété.

.Como a incrível Maureen Bisilliat que se instalou definitivamente no Brasil em 1957 e contruiu uma sólida carreira fotográfica. Esse ano de 2021, ela faz 90 anos.

Comme l’incroyable Maureen Bisilliat qui s’installe définitivement au Brésil en 1957 et construit une solide carrière photographique (Maureen vient d’avoir 90 ans en 2020).

Sur ses portraits, Ale Ruaro travaille toujours en noir et blanc. Utilisant la lumière naturelle et les éléments du quotidien de ses sujets, il entre dans l’univers de chacun d’eux. Lumière bien marquée, avec des textures apparentes, Ruaro a un langage particulier qu’il définit lui-même comme une photographie de personnes contemporaines avec le regard doux, sensible et solidaire d’un artiste du 17ème siècle. Mais cliquer des photographes est un défi encore plus difficile : comment révéler la personne et le photographe au-delà du personnage?

.©Ale Ruaro, Milton Guran

©Ale Ruaro, Milton Guran

Le portrait a toujours été étroitement lié à l’histoire de la photographie. Nous avons des vieux exemples qui datent de la découverte de la photographie, comme des images d’expéditions dans le «nouveau monde», le développement de la photographie policière (notamment les études criminalistes de Cesare Lombroso), ensuite les cartes de visite et les albums de famille du XIXe siècle, aux selfies actuels sur Internet.

Mais en quoi consiste un bon portrait?

Serait-ce un portrait qui montrerait l’âme du sujet, sa vraie personnalité? Ou qui capturerait une sorte de moment décisif de l’âme? Aurait-il un portrait vraiment authentique? Il est intéressant de noter que cet univers du portrait en photographie a toujours joué avec les apparences, les poses et la vraisemblance. Le portrait a toujours eu cette limite : entre l’authentique et la représentation. Même les portraits d’identité, ou les portraits scientifiques, mettent également en scène, mais à l’inverse : avec un manque extrême de ressources, conduisant à une perte d’authenticité.

L’une des grandes forces du portrait, ou du moins l’une des causes de notre grande fascination, est le lien avec la personne photographiée. Nous n’avons pas de paysage, ni de détail commun, nous avons les yeux de l’autre devant nous. Et dans ce cas, ce sont des regards attentifs et puissants de personnes qui ont raconté et racontent encore aujourd’hui, visuellement, l’histoire de notre pays et de notre peuple.

Alê Ruaro travaille depuis longtemps avec le portrait. En 2011 il a réalisé une série intitulée «Naked Friends» de portraits d’amis nus. Même ses séries les plus documentaires telles que « Hotel Ruby » et « BDSM » apportent des portraits saisissants. Dans «Portraits de la photographie brésilienne», l’artiste, comme il le commente, a voulu montrer la fragilité de ceux qui sont toujours derrière l’objectif. Le résultat est un dialogue constructif entre deux photographes.

Est ce que vous connaissez toutes ses personalités du monde photographique brésilien?

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Artistes et commissaires se réunissent pour aider Rio de Janeiro dans l’action solidaire “Fotos pró Rio”

Le texte originel a été publié sur le site de Iandé, ici. Et la photo d’ouverture est de Nair Benedicto.

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« Fotos Pró Rio » est une action de solidarité créée par de grands noms de la photographie de Rio de Janeiro: le festival de photographie FotoRio, les espaces culturels Ateliê Oriente, Retrato Espaço Cultural et la Galeria Aymoré. Ces institutions se sont réunies pour lancer ce projet de vente de photos pour aider la ville de Rio de Janeiro. En plus d’assister les photographes participants, victimes de cette pandémie sanitaire et politique, la campagne aidera également 3 ONG de Rio de Janeiro: Jongo da Serrinha, Solar Meninos de Luz e Redes da Maré.

Le projet a été inspiré par d’autres campagnes de solidarité qui ont été menées au Brésil et dans le monde (à Bergame, en Italie, par exemple) pour aider à la lutte contre le COVID 19. Juste pour énumérer quelques campagnes, au Brésil nous avons eu les « 150 fotos por São Paulo », « 150 fotos pela Bahia », « Fotos por Minas », POA 150 fotos », « 96 Awery – povos indígenas BA » et c’est toujours en cours  « Fotografias pelo Ceará », « Olhar Potiguar », « Fotografia que mandaver- AL », entre d’autres.  La différence avec l’action « Fotos Pró Rio » c’est que les invités sont les commissaires d’exposition et non les artistes. 82 conservateurs ont été appelés, qui à leur tour ont pu invité jusqu’à 5 artistes chacun, totalisant plus de 400 artistes participants. Chaque commissaire crée sa ligne de recherche, invite des artistes, qui ne peuvent participer qu’à une commission.

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Le lancement du projet s’est fait en direct sur l’instagram, lors de la journée internationale de la photographie, le 19 août. Le live, dirigé par Gabriela Davies, est passé par les différents organisateurs qui ont expliqué tous les détails de la campagne. Ils ont évoqué l’importance de l’action en rassemblant plus de 500 conservateurs, artistes et photographes de générations, de cultures et de parcours différents en faveur d’une aussi belle action. La campagne se déroule jusqu’au 18 octobre et comprend la participation de grands noms de l’art et de la photographie brésiliens, ainsi que de nouveaux artistes brésiliens et internationaux tels que Rosangela Rennó, Ana Bella Geiger, Cabelo, Evandro Teixeira, Walter Firmo, Bob Wolfenson, Graciela Iturbide, parmi beaucoup d’autres.  

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Fernanda Tafner, curadoria ioana mello

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Personnellement, je suis très heureuse d’avoir été invitée en tant que commissaire d’exposition et de créer un dialogue entre les cultures. Les artistes que j’ai invité et qui ont si gentiment accepté sont Fernada Tafner, Elsa Leydier, Benjamin Travade, Julio Villani et Shinji Nagabe. Le sentiment est d’essayer d’agir au milieu du chaos, en réunissant l’inspiration de l’art, de nouveaux regards et une action solidaire face à la situation difficile et actuelle. J’espère que tout le monde rejoindra ce cercle de solidarité.
*Pour plus d’informations et la liste des commissaires, artistes et images sur le site fotosprorio.com

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Table ronde sur le Marché de la photo, 2018

En partenariat avec Iandé et pendant Paris Photo 2018, j’ai pu participer du débat sur le marché de la photographie entre le Brésil et la France – avec Felipe Abreu et Isabella Prata (nov.2018, Galerie Collection Privée, Paris) et j’ai été co-commissaire d’une projection de photographes brésiliens.

In partnership with Iandé and during Paris Photo 2018, I was co-curator of a photographic projection of Brazilian photographers, and producer of the debate about the photography market between Brazil and France – with Felipe Abreu and Isabella Prata (Nov 2018, Galerie Collection Privée, Paris)

Visuel et invitation
Isabela Prata, Ioana Mello, Felipe Abreu
projection, photo de Karime Xavier
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